Adrien Bisecco – DNSEP Design des média avec mention

Matérialiser l’intangible
Comment faire pour recréer du lien et de l’intérêt pour la recherche scientifiques contemporaines auprès du grand public ? Les crises que notre société va traverser deviennent de plus en plus visibles, pourtant rarement la parole et les faits présentés par les scientifiques n’a été aussi défié et malmené. L’objet de ce travail est de situer le rôle du design des médias en tant qu’espace de frictions entre d’un côté la science contemporaine qui doit être mise en lumière et de l’autre le grand public pour qui certains sujets semblent opaques. 

Ces projets, vidéos, jeu narratif, cartes en réalité augmentée, paysages fictifs sont  interactifs. Les  images et volumes ont été réalisées grâce aux données fournies par l’Observatoire des sciences de l’Univers d’Orléans la Source. La  réalité augmentée comme support a été choisie pour sa capacité à faire dialoguer à la fois des objets imprimés, des espaces numériques mais aussi à mobiliser notre corps dans un lieu afin de révéler les dimensions immatérielles contenues par les supports imprimés. Le dialogue qui s’opère entre les données et les formes donne lieu à l’émergence de supports de narration et de poésie susceptibles de nourrir un imaginaire scientifique capable de sensibiliser à la nature avant tout humaine et subjective du travail de laboratoire.


@abisecco

Clément Bournas – DNSEP Design des média
Oriane Dalles – DNSEP Design des media avec les félicitations du jury

L’écoute automatique et le pan acousticon
L’émergence d’appareils intelligents dotés d’un microphone dont l’utilisation devient toujours plus ordinaire demande un examen actualisé. Une surveillance auditive s’organise au sein même de nos espaces acoustiques depuis des infrastructures numériques dont le fonctionnement, obscur, impénétrable, nous est délibérément dissimulé. Les usages de ces technologies paraissent assez bénins à première vue, mais j’ai voulu explorer plus en détail ce qu’entraînait cette mise sous écoute permanente des machines, qualifiée de panacoustique par le philosophe français Peter Szendy. Le domaine rendant cette écoute machinique possible est décrit sous le terme anglophone de Machine Listening, qui pourrait être traduit par “écoute automatique”. 
Le Machine Listening décrit un champ interdisciplinaire et en fort développement de la science et de l’ingénierie qui utilise le traitement du signal audio et l’apprentissage automatique, pour tirer du sens des sons et des paroles. C’est ce qui nous permet à la fois d’être “compris” par Siri et Alexa, ou de reconnaître un morceau de musique avec Shazam. Pour ma part je me suis intéressée plus particulièrement, non pas à la reconnaissance vocale, mais à ces technologies qui permettent d’écouter nos environnements sonores et d’en tirer du sens. Ces technologies se déploient commercialement sous forme de logiciels intégrables dans des caméras de surveillance, des assistants vocaux, des smartphones. 
J’ai tenté de rendre visible les rouages qui se cachent dans ces nouveaux outils de reconnaissance sonore, tout en essayant d’interpeller le spectateur sur ses usages, en me confrontant moi-même à cette écoute algorithmique permanente. Ces dispositifs arrivent dans notre quotidien, sur le marché des smartphones, des assistants vocaux ou de la maison connectée. Ils arrivent dans nos villes en toute discrétion, prenant place tant dans nos espaces privés que publics. Les gouvernements récoltent des données à des fins de sécurité et de contrôle ; les entreprises privées à des fins marketing, d’individualisation des offres, d’amélioration de leur gestion. Mais les entreprises privées commencent à s’intéresser à la sécurité et au contrôle, venant brouiller les infrastructures d’État et d’entreprise. Il faut selon moi dévoiler ces dispositifs, les démystifier afin de pouvoir les replacer dans le débat public.

Thibaut Dutarte – DNSEP Design des communs

Au cours de mes études, la notion d’organismes vivants a joué un rôle important dans mes travaux de recherche. Après un projet sur le mycélium (l’ensemble des filaments qui forment les champignons et qui peuvent se développer sur différents matériaux) où j’ai travaillé avec des organismes vivants comme collaborateurs, et pas seulement comme ressources, intégrer l’environnement urbain dans ce travail m’a semblé pertinent, car il présente des conditions et des interactions tout à fait atypiques pour accueillir la biodiversité.
La biodiversité et l’environnement urbain sont deux termes qui semblent spontanément inconciliables. Cette
incompatibilité apparente s’explique, à juste titre, par la pression indéniable que le second exerce sur le premier, dont l’éclairage urbain n’est qu’une réalité. Aujourd’hui, il semble que l’éclairage nocturne échappe à tout contrôle. Les systèmes d’éclairage publics et privés (transports, bureaux, logements, commerces, publicité, etc.) se combinent pour créer un halo lumineux (une teinte orangée sur les villes) qui empêche la contemplation des étoiles dans le ciel nocturne et modifie le comportement de la faune et de la flore. Nous savons que la perte de biodiversité est due à de nombreuses autres causes. Mais la ville n’est pas qu’un milieu hostile, elle contient aussi des espaces et des situations, encore trop peu nombreux, qui sont favorables à la présence du vivant. Le défi consiste donc à créer ces conditions en leur faisant de la place, aussi bien la nuit que le jour.
Si les progrès technologiques, l’avancée des actions tant juridiques que citoyennes ont permis d’initier un autre rapport à la lumière nocturne, beaucoup reste à faire sur ce point, tant sur le plan quantitatif que qualitatif. En effet, une clé réside probablement dans les usages et les représentations que nous avons construits au fil du temps. Avec une population de plus en plus urbaine à l’échelle mondiale, et une biodiversité menacée dans tous les milieux, il est plus qu’important de s’interroger sur l’impact de cette forme de pollution qu’est la lumière nocturne.
Dans ce contexte, il semble que le design puisse utilement contribuer à atténuer ce phénomène. Car la pratique du designer se situe à la croisée des enjeux socio-économiques et politiques, d’une réponse concrète mais aussi d’une analyse consciente des usages et de leur possible évolution. Au-delà des aspects techniques des dispositifs, la dimension sensible et plastique du design est peut-être un atout pour aider à changer notre regard avant d’imaginer changer nos comportements. Pour ce faire, nous devons traiter les questions soulevées par la problématique suivante : Quelle est la relation entre la biodiversité, les citadins et la luminosité nocturne dans l’espace public en milieu urbain ?
Pour ce faire, nous étudierons la question en trois parties, chacune traitant des interactions entre deux des trois notions clés identifiées : biodiversité, environnement urbain et luminosité nocturne. Dans un premier temps, nous tenterons d’analyser la relation entre la biodiversité et l’environnement urbain, puis celle entre la luminosité nocturne et l’environnement urbain, avant de nous intéresser aux interactions entre la biodiversité et la luminosité nocturne.


@thibaut.dutarte

Salma Essid – DNSEP Design des communs

Manuel et numérique sont deux mots qui, à première vue, semblent difficiles à concilier. Le design apparaît comme une discipline artistique et technique qui n’a de sens que si ces deux termes existent et se répondent. Être designer, c’est s’inscrire dans un processus complexe et créatif qui fait appel à de nombreuses compétences différentes. Si l’évolution de la fabrication numérique dans les domaines de l’art et du design semble indiquer l’émergence d’une nouvelle matérialité, soulignée par le développement de la fabrication additive, les anthropologies qui entourent les gestes numériques sont souvent décrites par une dissolution passive des gestes manuels. Le geste, dans sa définition générale, désigne un acte ou une action, très souvent, il manifeste une intention. Dans son aspect technique, il s’adresse à des objets, des outils et/ou des machines, et il est toujours lié à une pratique ou à un travail particulier. Il est directement impliqué dans les relations humaines, notamment celles qui lient l’homme à son environnement physique et matériel. Ma démarche créative consiste à relier l’artisanat aux technologies avancées, le manuel au numérique, pour donner naissance à des créations hybrides, intemporelles et débordantes de poésie, tant au niveau du message et de la méthode, que de la conception et du choix des matériaux. Mon mémoire s’intéresse donc à la recherche du champ et du vocabulaire d’une écriture commune, afin de créer un répertoire de pratiques plurielles qui se nourrissent d’elles-mêmes. Je m’interroge sur la place du designer dans cet entre-deux. Observer, tenter de comprendre et d’influencer la fabrication d’un objet à chaque étape du processus en ayant une approche centrée sur le geste ; modifier un élément subtil en début de chaîne pour observer quel que soit le résultat ; tester l’erreur : telles sont les consignes de mon travail. Enfin, Le cœur du questionnement de cette thèse, est de savoir, comment tisser un dialogue entre deux disciplines, le manuel et le numérique, en incluant l’anthropologie et la logique numérique. Quelles manières d’observer, d’analyser et de capter ? Avec quels dispositifs ? Sera-t-il possible de créer un lien entre le numérique et le manuel ? Quelle place le designer occupe-t-il dans cet entre-deux ?

@salmaessid

essidsalma.me

Allban Fégar – DNSEP Design des communs avec mention

Activer la rue !

Repenser nos moyens d’activation citoyenne de l’espace public en dehors du cadre institutionnel.
« Votre livreur a eu un accident ici » est un dispositif de signalement physique et numérique visant à interpeller sur les risques du métier des livreurs à vélos. Il a été mené avec et pour ces travailleurs du numérique. Un papier marouflé au sol interpelle localement les passants et les collectivités territoriales sur l’ampleur des accidents subis. Son prolongement numérique via Twitter interpelle les plateformes employeurs sur leurs inactions face à ces urgences. Cette action amplifie les situations pour les faire entrer à plus grande échelle dans le débat public.

Le manque de flexibilité dans les lois empêchent le citoyen d’être partie prenante de la gouvernance des biens publics. Activer la rue est un acte citoyen fondateur de nouvelles normes en affirmant que le citoyen peut être un acteur à l’élaboration des biens communs. Il s’agit de permettre un art des situations pour réinterroger nos manières de faire société. Un des enjeux est de garantir l’inclusivité de l’espace public en accueillant une pluralité de pratiques de faire la rue. C’est aussi redonner une capacité d’action en légitimant nos manières de faire. Qu’elles soient informelles importe peu tant qu’elles ont pour vocation à défendre des intérêts communs.

@allbanfegar

albanfegar.portfoliobox.net

Mathilde Goncalves – DNSEP Design des média avec mention
Luiz Gustavo Machado de Caravalho – DNSEP Design des communs avec les félicitations du jury

La capacité du vivant à promouvoir la fascination et l’affiliation chez l’homme est à l’origine de la théorie biophilique actuelle et de sa pratique dérivée des sciences naturelles, le design biophilique. À travers une analyse des textes séminaux et actuels de la biophilie et des pratiques contemporaines de design dans l’Anthropocène, cet ouvrage positionne politiquement le design et la biophilie. De plus, sur la base d’une analyse symbolique de ces domaines, et de leur association à des projets bio-inspirés, ce texte propose un contexte théorique et référentiel préliminaire pour le développement possible de la Biophilie Symbolique en tant que pratique de design adéquate dans l’Anthropocène.

@luizguste

Emmanuel Hugnot – DNSEP Design des communs avec les félicitations du jury

Processus ouvert

En proposant une analyse critique détaillée des processus de conception et de fabrication assistés par ordinateur, la thèse d’Emmanuel Hugnot invite à une lecture renouvelée du rôle de la robotique et de la computation au sein des processus de conception et de fabrication. Défendant un paradigme d’ouverture et d’hybridation des pratiques artisanales avec le numérique, elle tente d’appréhender les outils d’impression 3D comme des outils d’écriture, dont la compréhension et la maîtrise constituent une forme de littératie qui conditionne l’émancipation du designer. Par le biais d’une recherche créative, cette thèse, soutenue par l’expérimentation, constitue un guide destiné à partager ce langage, en vue de pluraliser les processus et les formes de création contemporaine. La pluralité des pratiques, que permettent les processus ouverts, suggère une alternative au système productif, stimulant les pratiques artisanales augmentées par la fabrication assistée par ordinateur. L’ouverture des technologies permet l’accélération de leur développement et une meilleure compréhension de leurs processus. Pour mettre en œuvre de nouveaux principes productifs, il faut des outils, de savoir-faire, mais surtout de « faiseurs », capables de concevoir une méthode ou des projets qui auront la qualité de transmettre le processus ou du moins de le faire apparaître. Le changement de paradigme que permet un rapport ouvert à la technologie est déjà en cours, nous avons vu de nombreux exemples d’artisans numériques pratiquant l’hybridation des modes de faire. Il s’agit maintenant, par la désacralisation technique, de faire perdurer ces pratiques en les multipliant par la pluralité des processus ouverts et leur diffusion.

@emmanuelhugnot

ehugnot.free.fr

Gabriel Martinez – DNSEP Design des média avec les félicitations du jury
Thérèse Nalin – DNSEP Design des communs

Je souhaitais comprendre pourquoi nous avons honte de parler des organes génitaux féminins, et faire prendre conscience des schémas de pensée de notre société actuelle afin de nous en émanciper et d’en créer de nouveaux. Je voulais comprendre d’où vient cette méconnaissance du sexe féminin et retracer l’histoire, notamment la  » découverte  » tardive du clitoris (organe qui s’étend sur près de onze centimètres). L’organe responsable du plaisir féminin est longtemps resté dans l’ombre de la science et de la société, subissant les assauts répétés de la religion ou du freudisme, voyant dans le clitoris une menace pour la domination masculine. La société patriarcale a une grande part de responsabilité dans la culpabilité, la honte et la pression que peuvent ressentir les femmes dans leur plaisir sexuel. Montrer et revendiquer l’existence du clitoris comme organe érectile, et donc actif, permet de légitimer et d’ancrer la sexualité féminine comme forte et active. Cela passe aussi par le vocabulaire de la vie quotidienne, pour ne plus dire  » vagin  » pour désigner la  » vulve « . C’est mettre en lumière les schémas de pensée actuels qui nous perturbent, afin de les briser en en reconstruisant de nouveaux, plus sains pour tous. Pour les femmes, c’est aussi apprendre à sentir leur propre organe, à comprendre ce qui se passe dans leur corps et comment il fonctionne.

Dans une démarche d’amélioration du quotidien, je souhaite travailler sur l’autodidactisme sexuel féminin en fournissant des outils d’auto-observation, d’auto-expérimentation, permettant d’acquérir une forme d’autonomie et de confiance en soi, afin de devenir actrice de sa propre sexualité. L’enjeu est de construire une base de connaissances collaborative et partagée. Comment amener les gens à parler de leurs vulves sans tabou dans différents espaces sociaux ? Quel discours adopter pour légitimer ce sujet et faire comprendre l’importance de s’observer, d’être curieux ? Est-il possible de créer des outils avec des modules qui s’adapteraient à toutes les personnes ayant des vulves ? Je souhaite normaliser et faciliter l’accès à notre propre vulve, que ce soit pour le soin ou le plaisir, dans une démarche féministe qui revendique le droit à la liberté sexuelle.

@theresenalin

Maëva Passereau – DNSEP Design des média
Maëlle Pires – DNSEP Design des communs avec mention
Pauline Stein – DNSEP Design des média avec les félicitations du jury

Pour une meilleure inclusivité des systèmes d’écriture sur le Web

Si le Web véhicule une image de melting pot culturel, communautaire et linguistique, les faits montrent une toute autre réalité. Loin de l’idée de « village global », le Web est un lieu exclusif, voire hostile pour les systèmes d’écriture autre que l’alphabet latin. Ce constat est partagé par de nombreux.ses observateur.rice.s. En effet, le Web fut construit à partir et pour l’anglais écrit avec l’alphabet latin. Or, chaque langue et chaque écriture engendrent une logique qui leur est propre. Cela a pour conséquence d’attribuer une logique inhérente au Web. Celle-ci n’est pas systématiquement compatible avec tous les systèmes d’écriture et les langues utilisées en ligne, bien au contraire. Ces dernières font alors face à des difficultés d’écriture, d’affichage ou encore d’intégration, qui empêchent une utilisation correcte du Web
La logique de la langue anglaise est en effet partout, sur le clavier de l’utilisateur.rice comme pour les langages de programmation et le code des programmes qui fondent la logique computationnelle qui s’écrivent pour l’écrasante majorité dans la langue de Shakespeare. Dans quelle mesure est-il possible de changer la donne ? Comment mieux accueillir des systèmes d’écriture aux logiques différentes ? Quelle est la responsabilité du designer sur ces inégalités ? Peut-on en tant que graphiste, typographe, dessinateur.rice de caractères mettre en place des systèmes et des procédures qui intègrent mieux ces systèmes d’écriture ?


@pauline_stein_

paulinestein.fr

Ella Tudoret – DNSEP Design des média